Brisons l’Indifférence.
Nous recevons régulièrement des nouvelles de Jean Lassalle, dont le périple continue, dans ce qu’il est convenu d’appeler la France profonde.
Pour des militants impliqués sur le terrain, dans leur ville, leur canton ou leur circonscription, ce que nous rapporte Jean Lassalle n’a rien de surprenant. Nous nous heurtons depuis des mois déjà à ce que j’appelle l’indifférence,
si bien décrite d’ailleurs par Antonio Gramsci* (Voir texte en fin d’édito) en son temps déjà.
Oui, nos concitoyens nous haïssent, mais nos dirigeants ne s’en rendent pas compte. Oui, ils ne croient absolument plus à la politique, le mot lui-même est presque devenu un gros mot ; d’ailleurs, les taux d’abstention croissants à chaque consultation électorale le démontrent aisément, mais nos dirigeants ne veulent pas le voir. Oui, ceux qui votent se réfugient dans des choix protestataires aux extrêmes de l’éventail politique, mais nos dirigeants s’illusionnent sur les causes réelles de ces choix. Oui, nos concitoyens n’ont absolument plus confiance dans la capacité des politiques à redresser la situation difficile dans laquelle nous nous trouvons, mais nos dirigeants continuent à se cramponner à de vieilles lunes d’une autre ère, et appliquent inlassablement des cautères sur une jambe de bois.
Tout cela, nous l’avons entendu des Morbihannais que nous essayons d’intéresser à la politique au sens noble du terme. Mais nous sommes victimes d’une confusion, qui mélange dans leur esprit la totalité du personnel politique, de Cahuzac au conseiller municipal, de Woerth au conseiller communautaire : tous pourris, tous mis au même niveau !
Y a-t-il pour autant une issue à cette situation, génératrice de tous les dangers, mortelle à terme pour une démocratie ? A première vue, le mal est si profond que je serais tenté de dire non ; à cet égard, je crains fort que l’expression de ce désamour se fasse dès cet automne dans la rue sur un mode violent. Néanmoins, mon optimisme né m’invite à modérer cette première réponse. Nos concitoyens manquent de beaucoup de choses, mais pas de bon sens. Ils ont des neurones, ainsi que le mode d’emploi. C’est précisément par la base que le redressement doit être entrepris, s’il en est encore temps. C’est au militant qu’il revient de l’entreprendre, en se démarquant résolument de tout engagement de politique politicienne, en encourageant, voire en promouvant toute initiative locale participative, qu’il s’agisse d’économie, d’associatif, de social ou de tout autre domaine de la vie publique.
Briser l’indifférence devient un impératif vital. C’est notre responsabilité de le tenter, si possible de le réussir.
Jacques ISNARD
* Antonio Gramsci (1891 – 1937) auteur du texte qui suit est un intellectuel, homme politique italien d’origine albanaise. Il fut un des membres fondateurs du Parti communiste italien, qu’il a dirigé à ses débuts.
Il a été emprisonné sous le régime de Benito Mussolini : «il faut empêcher ce cerveau de penser !» L’indifférence
«Ce qui se passe, le mal qui s’abat sur tous, le bien possible qu’un acte héroïque peut provoquer, tout ça revient moins à l’initiative de quelques personnes qui agissent qu’à l’indifférence, à l’absentéisme de la majorité.
Ce qui arrive, arrive non pas parce que certains veulent qu’il arrive, mais parce que la majorité abdique sa volonté, laisse faire, laisse se grouper les noeuds qu’ensuite seule l’épée pourra couper, laisse promulguer les lois qu’ensuite seule la révolte fera abroger, laisse aller au pouvoir les hommes qu’ensuite seul une révolution pourra renverser.
La fatalité qui semble dominer l’histoire n’est que l’apparence illusoire de cette indifférence, de cet absentéisme. Des faits mûrissent à l’ombre, juste quelques mains, à l’abri de tout contrôle, tissent la toile de la vie collective, et la masse ignore, car elle ne s’en soucie point. Les destins d’une époque sont manipulés selon des vues étriquées, des buts immédiats, des ambitions et des passions personnelles de petits groupes actifs, et la masse ignore, car elle ne s’en soucie point.»
A. GRAMSCI
Posté sur le blog par MoDem Morbihan, dimanche 22 septembre 2013 || Catégorie(s) : Nos Ecrits